La télémédecine et les outils numériques ont montré à quel point, dans un contexte de crise sanitaire, ils pouvaient simplifier l’accès aux soins. Patients et médecins ont pu jauger le potentiel des nouvelles technologies pour établir des diagnostics à distance. Si le recours à la télémédecine, lors des confinements, devait être une solution provisoire, aujourd'hui, ni les patients ni les praticiens ne veulent y renoncer. Elle est bel et bien entrée dans les mœurs.
Le gouvernement français a lancé son programme de télémédecine en 2009. Cinq actes de télémédecine sont inscrits et organisés dans le Code de la santé publique : la téléconsultation, la téléexpertise, la télésurveillance médicale, la téléassistance médicale et la réponse médicale. L’Assurance-maladie rembourse, quant à elle, les actes de téléconsultation depuis septembre 2018 – et les actes de télé-expertise, depuis février 2019. Mais, jusqu’en 2020, l’adoption de la télémédecine est restée faible. En 2019, la téléconsultation ne représentait pas plus de 0,04 % de l’ensemble des consultations médicales. Il a fallu attendre que la pandémie de Covid-19 frappe pour changer la donne.
Télémédecine : d’une alternative de niche à une pratique entrée dans les mœurs
Les actes de téléconsultations et de téléexpertises ont été propulsés sous les feux de la rampe au cours des vagues successives de la pandémie. D’après une récente étude de l’Institut économique Molinari, publiée le 18 janvier 2022, ils sont passés de 40 000 par mois en février 2020 à 4,5 millions en avril 2020. Les trois quarts des médecins généralistes ont mis en place la téléconsultation, alors que moins de 5% la pratiquaient avant la pandémie, selon la Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques (Drees). La télémédecine a également joué un rôle décisif dans la préservation de la santé et du bien-être de millions de patients.
Si le recours à la télémédecine, lors des confinements, devait être une solution provisoire, aujourd’hui, ni les patients ni les praticiens ne veulent y renoncer. Elle est bel et bien entrée dans les mœurs. En Europe, les Français sont d’ailleurs les plus favorables à la télémédecine avec 73% de jugements positifs. Et, 49 % des 335 personnes interrogées en France ont indiqué n’avoir eu aucune hésitation à recourir à des téléconsultations en 2020, que ce soit pour obtenir un avis médical ou un traitement (étude en ligne, menée par OnePoll pour Nuance Communications, entre le 21 avril et le 7 mai 2021). Les Français appellent d’ailleurs les pouvoirs publics à investir davantage dans cette alternative aux consultations traditionnelles en cabinet. En outre, 69% des médecins interrogés, dans le cadre du sondage Odoxa, sont favorables au développement de la télémédecine.
Une solution à plusieurs défis du système français de santé
Le système de santé français souffre d’inégalités territoriales, d’une pénurie de médecins et d’infirmiers, ainsi que d’une vague de burn-out amplifiée par la pandémie de Covid-19. Les dépenses de santé sont aussi particulièrement élevées, compte tenu du morcellement de ses services et de ses acteurs, mais aussi de la complexité administrative. Les nouvelles technologies peuvent aider à réaliser des soins et des diagnostics à moindre coût. Par exemple, le recours aux téléconsultations et téléexpertises permettrait d’économiser 467 millions d’euros pour l’Assurance maladiesur l’ensemble des consultations de généralistes et de spécialistes.
La télémédecine offre aussi une multitude d’avantages aux patients :
- Améliorer l’accessibilité aux soins sur tout le territoire ;
- Réduire les temps d’attente des patients en mettant à leur disposition un plus grand choix de praticiens et ainsi pallier les déserts médicaux ;
- Améliorer la qualité des soins grâce à une meilleure communication entre professionnels de santé.
Côté médecins, les pratiques de la télémédecine peuvent également contribuer à :
- Réduire leur temps de déplacement pour qu’ils puissent consacrer une plus grande partie de leur journée de travail aux consultations ;
- Assurer un suivi plus fréquent et informel avec les patients ;
- Renforcer la collaboration en temps réel entre les praticiens, grâce à la saisie numérique des données et des informations partagées lors des actes de télémédecine ;
- Combattre l’épuisement et aider à améliorer la Qualité de Vie au Travail des médecins en éliminant une partie des tâches administratives et des efforts associés à la gestion des rendez-vous physiques ;
- Donner une nouvelle forme d’exercice aux professionnels de santé, complémentaire au suivi du patient en présentiel et en adéquation avec les aspirations de concilier vie professionnelle et personnelle.
Mais, tous ces avantages ne découlent pas automatiquement des actes de télémédecine. Pour en profiter pleinement, les médecins doivent faire évoluer leur pratique médicale, en adoptant de nouveaux outils et nouvelles technologies et les compétences nécessaires à la prise en charge du patient à distance.
L’avenir de la télémédecine centré sur le patient et axé sur l’IA
Les pratiques de la télémédecine ouvrent la voie à un nouveau paradigme : elles changent fondamentalement la façon dont les patients reçoivent des soins, la forme des engagements en matière de soins de santé et notre façon de concevoir la prestation des soins.
Elles doivent susciter de nouveaux questionnements, tels que :
- Comment faciliter la saisie des données cliniques et les partager entre praticiens ?
- Comment appliquer l’IA pour accélérer le diagnostic ?
- Comment les patients souhaitent-ils s’engager avec les médecins dans un contexte virtuel, et en quoi cela diffère-t-il des consultations physiques ?
- Comment optimiser les offres de télémédecine actuelles pour faire évoluer et fluidifier le parcours patient ?
L’IA, intégrée au cloud et l’utilisation de dispositifs médicaux connectés par le patient ont ainsi un rôle important à jouer dans la création d’excellentes expériences de téléconsultation augmentée. Plusieurs établissements de santé utilisent déjà l’IA pour améliorer la qualité des soins délivrés aux patients. La reconnaissance vocale médicale alimentée par l’IA, par exemple, permet aux médecins de créer des notes cliniques précises et détaillées simplement en parlant. Reconnue comme une technologie capable de redonner du temps médical aux médecins, ses avantages s’amplifient dans le contexte de la télémédecine. Il est déjà complexe d’établir une connexion humaine par vidéo ; la dernière chose dont un médecin a besoin est de regarder constamment son clavier et de taper des notes ou de passer des heures après sa journée de consultations pour finaliser les comptes-rendus. Aux Etats-Unis, la solution Dragon Ambient eXperience (DAX), compatible avec toutes les plateformes de téléconsultation, permet l’automatisation de la documentation en temps réel dans le dossier patient. (DAX est pour le moment uniquement disponible sur le marché nord-américain).
Les patients français reconnaissent également la valeur de l’IA dans leur parcours de santé. Le cabinet OnePoll a récemment interrogé les Français sur les avantages de la documentation clinique assistée par l’IA :
- 31% ont déclaré que cela aiderait davantage leur médecin à se concentrer sur le diagnostic,
- 47 % que cela leur ferait gagner du temps,
- et plus d’un tiers que cela améliorerait le niveau de détail et de précision.